jeudi 24 avril 2008

Sur le Retour

S’il y a un thème qui obsède tous les Tunisiens à l’étranger, c’est bien celui du Retour. Certains ont une opinion très forte sur le sujet, mais la majorité est tiraillée dans un terrible dilemme du type « should I stay or should I go !?».

Afin de mieux comprendre les dynamiques de ce retour sur un plan macro plutôt qu’individuel, regardons ce qui c’est passé pour les élites :

  • Années 50 / 60 : Bâtir le pays
À l’aube de l’indépendance (et même avant) les élites Tunisiennes se formaient en France. Tels des pionniers, ils rentraient en grande majorité au pays pour le construire. Ils étaient souvent appelés à tenir des postes à responsabilité dans l’administration ou dans les entreprises publiques. Pour ces bâtisseurs, le choix entre le retour en Tunisie et la France était en général évident, mais ce modèle est rapidement arrivé à saturation à cause du nombre limité d’opportunités.
  • Années 70 /80 : Importer le savoir
Dans les années 70 et surtout 80, on a commencé à voir l’émergence des multinationales. Les élites Tunisiennes rentraient alors avec la perspective d’accompagner une multinationale dans son installation dans le pays ou bien avec une idée entreprenariale à répliquer. La destination majeure restait la France mais on voyait déjà émerger l’Allemagne, le Canada et même l’URSS !
  • Années 90 : « Tout sauf la Tunisie! »
Dans les années 90, les flux de retour c’est brusquement arrêté et le flux de départs c’est accéléré. L’explication triviale est la situation politique du pays pendant cette décennie, car pour beaucoup c’était « tout sauf la Tunisie! ». Bien que réel, ce phénomène centrifuge cache un autre plus fondamental, celui de la mondialisation. Pendant ces années les Tunisiens ne regardaient plus exclusivement la France, ni même l’Europe, mais ils partaient partout : Les états-Unis, le golfe arabe, voire au Japon. À la force centrifuge s’est rajoutée une croissance énorme dans les opportunités, notamment dans les technologies de l’information et dans la Recherche. La communauté d’émigrés qualifiés a progressivement cédé sa place à une dispora, présente aux 4 coins de la planète.
  • ...et maintenant : le retour post Globalisation
Aujourd’hui, avec une Tunisie redevenue attractive pour ces élites, on commence à percevoir la troisième vague de retour. Contrairement aux deux autres vagues, celle-ci n’est pas conçue de manière unidimensionnelle (souvent sur l’axe Etranger vs Tunisie) mais plutôt dans le cadre de la globalisation. L’idée de retour est à nouveau d’actualité mais comme une option parmi d’autres. Le patriotisme qu’avaient les pionniers est toujours la mais bien plus diffus, et les opportunités sont de plus en plus comparables. Je pense que cette nouvelle vague a déjà démarré et qu’elle ira en s’intensifiant jusqu'à atteindre un équilibre naturel.

mardi 22 avril 2008

mercredi 9 avril 2008

Blogosphere Tunisienne et Pacte Jeunesse

Le phénomène de Blogs est entrain de révolutionner et de démocratiser l’information d’une manière sans précédent. La croissance exponentielle ne semble pas s’arrêter et le nombre de blogs dépasse aujourd’hui les 35 millions! Ce phénomène bouscule plusieurs idées reçues et redéfinit des nouvelles règles du jeu.

Blogosphere Tunisienne est un espace de discussion, ou des Tunisiens, se rencontrent pour exprimer leurs opinions, préoccupation et autres états d’âmes. Contrairement aux sites d’oppositions, ces bogs sont en général apolitiques et rarement partisans. Ils sont constructifs et grouillent de bonnes idées, mais avant tout, ce sont simplement un espace de liberté où une discussion authentique peut avoir lieu.

Le pouvoir Tunisien, définit et contrôle l’espace politique qu’il considère légitime. Pour ce faire, il a eu deux comportements  vis a vis de ce qui se passe en dehors de sa sphère : tantôt, il est « éradicationniste », tantôt il est « inclusioniste » : Lorsque la chose est en contradiction avec son projet, il l’élimine (censure de site Internet par exemple), mais lorsqu’elle est en cohérence avec ses principes, il n’hésite pas à se l’approprier et à l’incorporer.

Je crois que la consultation nationale pour la jeunesse est avant tout une réaction de nature « inclusioniste ». L’existence même de la Bogoshpere prouve que les jeunes ont non seulement soif de liberté d’expression, mais qu’ils peuvent être une réelle force de proposition.

Qu’on le voit d’un œil sécuritaire ou d’un œil réformateur, le pouvoir ne pouvait pas laisser cette énergie lui échapper.

En pessimiste, on peut penser que, par cette initiative, le pouvoir essaye de canaliser la discussion, et qu’il n’avait pas le choix vu l’ampleur du phénomène. Mais en optimiste, on peut considérer que la discussion l’a poussé à réagir. Il serait alors à l’écoute à partir du moment ou la pression est bien dosée.

mardi 8 avril 2008

Le Pacte, tradition politique Tunisienne

A l’occasion du lancement du Pacte Jeunesse, il convient de rappeler l’usage de ce moyen politique dans l’histoire de la Tunisie.

  • Pacte fondamental - 1857 - Initié par les réformateurs Tunisiens du 19eme siècle sous l’égide de Mohammed Bey, le Pacte fondamental, instaure une ébauche de droit public et reconnaît l'égalité devant la loi à tous les habitants du pays . Il a fourni la base de la revendication destourienne et a inspiré la première constitution du pays indépendant.
  • Pacte Social - 1977 - Intervenu dans un moment de crise sociale, ce Pacte , était censé garantir tout à la fois la paix civile, l’accroissement de la production et la hausse du pouvoir d’achat. Il était signé entre le gouvernement et les partenaires économiques et sociaux, dont surtout l’UGTT, mais n’a malheureusement pas empêcher le drame de 1978.
  • Pacte National – 1988 - Un an après le Changement, l'ensemble des partis politiques et organisations nationales ont signé un Pacte national consacrant les valeurs et les fondements d'une société tunisienne tolérante, démocratique et tournée vers l'avenir.

Aujourd’hui, le régime lance un dialogue national avec les jeunes, afin d’aboutir « à l'élaboration d'un Pacte de la jeunesse portant sur les constantes et les choix majeurs que nos jeunes œuvrent à consacrer».

L’histoire nous a montré que les pactes interviennent dans un moment de crise ou dans un élan de reforme : quelle est la motivation derrière ce pacte jeunesse ?

Aussi, cela ressemble étrangement à un procédé de type démocratique dans une société non démocratique qui se dit /veut démocratique…Quel rôle aura ce pacte dans la trajectoire réformatrice du pays ?

Enfin, on peut, candidement, saluer cette initiative car elle semble aller dans le bon sens.

lundi 7 avril 2008

« Don’t cry for me Argentina »

Je suis rentré enchanté de ce voyage en Argentine ou le highlight fut les longues balades à cheval dans la Pampa, avec mes amis Gauchos.

Mais ce que je retiens surtout c’est l’esprit des Argentins et la confiance qu’ils affichent : malgré deux dictatures (Peron et La Junte militaire), une guerre (des Malouines) et une crise économique (2002) sans précédent, les Argentins sont toujours debout.

La blague qui dit que « Les Argentins, ce sont des Italiens qui parlent espagnol, pensent en anglais et rêvent d'être Français » n’est pas très loin de la réalité…en tout cas, elle n’est pas loin de l’opinion que les Argentins se font d’eux mêmes.

Le pays du Che a certes beaucoup de raisons d’être fier, mais beaucoup y voient de l’arrogance. Je pense qu’au contraire, il faut en prendre l’exemple car cette fierté, même exagérée, est un moteur extraordinaire pour croire dans le futur et aller de l’avant.

dimanche 6 avril 2008

Zone of Possible Agreement

En négociation, on appelle Zone d’Accord Possible l’intersection entre les possibilités des différentes parties : si vous etes acheteur et vous vous fixez comme prix maximum 100, face à un vendeur, qui ne descendra pas en dessous de 80, alors votre Zone d’accord potentiel est entre 80 et 100. Il va de soi que plus la ZAP est grande, plus il est aisé de trouver un accord.

En politique, il en va de même : plus la zone d’accord entre les parties en compétition est large, plus un accord est possible. Dans les démocraties, l’étendue de cette zone est un gage de stabilité. En France par exemple, il s’agit des fameux « principes républicains » qui délimitent de l’espace politique dans lequel la compétition pour le pouvoir se déroule de manière naturelle et pacifique.

La Tunisie, aspirant à réaliser un jour sa transition démocratique, doit s’interroger sur la définition de cet espace : Quel est cet ensemble de valeurs ? La république, est-elle un concept suffisamment cher aux tunisiens pour être irréversible ? La tunisianité, est-ce un concept clair et bien ancré ? Aussi, est ce un concept bien différencié, car le restreindre à l’arabité ou à l’islam risque de changer le périmètre de l’espace politique considéré, et rend l’Accord potentiellement possible avec d’autres.

Les réponses à ces questions sont complexes et en perpétuelle évolution, mais représentent, à mon avis des prérequis du projet démocratique.