Après plus d’un an d’études dans une université anglo-saxonne et
un trimestre dans une homologue japonaise, j’ai réalisé a quel point la terre n’est pas ronde, historiquement, culturellement et dans la façon de faire des affaires. Le Japon et les États-Unis en sont évidemment aux antipodes, l’Europe et le reste du monde sont entre les deux. Voici deux éléments pour illustrer cette différence :
Explicite vs Implicite :Avec sa culture ultra sophistiquée et codifiée, le Japon est le pays ou tout est implicite. On vous dira jamais "oui" ou "non", mais on vous signifiera le degré d’accord ou de désaccord par des moyens subtiles, permettant de conserver la fluidité d’une discussion et de « garder la face ». Dans les entreprises, le savoir est très souvent implicite et diffus. Toyota par exemple n’a formalisé son fameux « Production System » qu’en s’internationalisant. Au Japon, ils n’en ont jamais ressenti la nécessite. Par contraste, les Américains vont être directs et explicites en tout. La subtilité japonaise évoquée ci-haut est prise pour de l’hypocrisie et le savoir implicite est considéré dangereux, notamment si on se sépare des employés clefs…chose encore inconcevable au Japon.
Le groupe vs l’individu:Alors que l'individu triomphe en Occident, c’est l’appartenance qui compte au Japon. Certes les Japonais souffrent parfois d’une grande pression sociale pour s’aligner sur le groupe, mais au fond, c’est ainsi qu’ils conçoivent la harmonie sociale. Le cas des marques de luxe au Japon est instructif : Alors qu’en occident, le luxe doit rester exclusif, au Japon, il est popularisé et partagé par tous. Une marque n’atteint la notoriété que si elle sert le groupe.
Professionnellement, les japonais sont excellents pour travailler en équipe, et malgré les lenteurs et les inefficiences du consensus, il restent compétitifs. Par exemple, alors qu’aux Etats Unis, l’innovation provient pour l’essentiel de start-ups, reposant sur le génie d’un individu ou d’un petit groupe, au Japon elle émane des multinationales mêmes.